Voulons que l'édit du feu Roi de Glorieuse Mémoire,
notre très honoré seigneur et père, du 23 avril 1615, soit exécuté
dans nos îles; ce faisant, enjoignons à tous nos officiers de
chasser de nosdites îles tous les juifs qui y ont établi leur
résidence, auxquels, comme aux ennemis déclarés du nom chrétien,
nous commandons d'en sortir dans trois mois à compter du jour
de la publication des présentes, à peine de confiscation de corps
et de biens.
Article 2
Tous les esclaves qui seront dans nos îles seront
baptisés et instruits dans la religion catholique, apostolique
et romaine. Enjoignons aux habitants qui achètent des nègres nouvellement
arrivés d'en avertir dans huitaine au plus tard les gouverneur
et intendant desdites îles, à peine d'amende arbitraire, lesquels
donneront les ordres nécessaires pour les faire instruire et baptiser
dans le temps convenable.
Article 3
Interdisons tout exercice public d'autre religion
que la religion catholique, apostolique et romaine. Voulons que
les contrevenants soient punis comme rebelles et désobéissants
à nos commandements. Défendons toutes assemblées pour cet effet,
lesquelles nous déclarons conventicules, illicites et séditieuses,
sujettes à la même peine qui aura lieu même contre les maîtres
qui lui permettront et souffriront à l'égard de leurs esclaves.
Article 4
Ne seront préposés aucuns commandeurs à la direction
des nègres, qui ne fassent profession de la religion catholique,
apostolique et romaine, à peine de confiscation desdits nègres
contre les maîtres qui les auront préposés et de punition arbitraire
contre les commandeurs qui auront accepté ladite direction.
Article 5
Défendons à nos sujets de la religion protestante
d'apporter aucun trouble ni empêchement à nos autres sujets, même
à leurs esclaves, dans le libre exercice de la religion catholique,
apostolique et romaine, à peine de punition exemplaire.
Article 6
Enjoignons à tous nos sujets, de quelque qualité
et condition qu'ils soient, d'observer les jours de dimanches
et de fêtes, qui sont gardés par nos sujets de la religion catholique,
apostolique et romaine. Leur défendons de travailler ni de faire
travailler leurs esclaves auxdits jours depuis l'heure de minuit
jusqu'à l'autre minuit à la culture de la terre, à la manufacture
des sucres et à tous autres ouvrages, à peine d'amende et de punition
arbitraire contre les maîtres et confiscation tant des sucres
que des esclaves qui seront surpris par nos officiers dans le
travail.
Article 7
Leur défendons pareillement de tenir le marché
des nègres et de toute autre marchandise auxdits jours, sur pareille
peine de confiscation des marchandises qui se trouveront alors
au marché et d'amende arbitraire contre les marchands.
Article 8
Déclarons nos sujets qui ne sont pas de la religion
catholique, apostolique et romaine incapables de contracter à
l'avenir aucuns mariages valables, déclarons bâtards les enfants
qui naîtront de telles conjonctions, que nous voulons être tenues
et réputées, tenons et réputons pour vrais concubinages.
Article 9
Les hommes libres qui auront eu un ou plusieurs
enfants de leur concubinage avec des esclaves, ensemble les maîtres
qui les auront soufferts, seront chacun condamnés en une amende
de 2000 livres de sucre, et, s'ils sont les maîtres de l'esclave
de laquelle ils auront eu lesdits enfants, voulons, outre l'amende,
qu'ils soient privés de l'esclave et des enfants et qu'elle et
eux soient adjugés à l'hôpital, sans jamais pouvoir être affranchis.
N'entendons toutefois le présent article avoir lieu lorsque l'homme
libre qui n'était point marié à une autre personne durant son
concubinage avec son esclave, épousera dans les formes observées
par l'Église ladite esclave, qui sera affranchie par ce moyen
et les enfants rendus libres et légitimes.
Article 10
Les solennités prescrites par l'ordonnance de
Blois et par la Déclaration de 1639 pour les mariages seront observées
tant à l'égard des personnes libres que des esclaves, sans néanmoins
que le consentement du père et de la mère de l'esclave y soit
nécessaire, mais celui du maître seulement.
Article 11
Défendons très expressément aux curés de procéder
aux mariages des esclaves, s'ils ne font apparoir du consentement
de leurs maîtres. Défendons aussi aux maîtres d'user d'aucunes
contraintes sur leurs esclaves pour les marier contre leur gré.
Article 12
Les enfants qui naîtront des mariages entre esclaves
seront esclaves et appartiendront aux maîtres des femmes esclaves
et non à ceux de leurs maris, si le mari et la femme ont des maîtres
différents.
Article 13
Voulons que, si le mari esclave a épousé une
femme libre, les enfants, tant mâles que filles, suivent la condition
de leur mère et soient libres comme elle, nonobstant la servitude
de leur père, et que, si le père est libre et la mère esclave,
les enfants soient esclaves pareillement.
Article 14
Les maîtres seront tenus de faire enterrer en
terre sainte, dans les cimetières destinés à cet effet, leurs
esclaves baptisés. Et, à l'égard de ceux qui mourront sans avoir
reçu le baptême, ils seront enterrés la nuit dans quelque champ
voisin du lieu où ils seront décédés.
Article 15
Défendons aux esclaves de porter aucunes armes
offensives ni de gros bâtons, à peine de fouet et de confiscation
des armes au profit de celui qui les en trouvera saisis, à l'exception
seulement de ceux qui sont envoyés à la chasse par leurs maîtres
et qui seront porteurs de leurs billets ou marques connus.
Article 16
Défendons pareillement aux esclaves appartenant
à différents maîtres de s'attrouper le jour ou la nuit sous prétexte
de noces ou autrement, soit chez l'un de leurs maîtres ou ailleurs,
et encore moins dans les grands chemins ou lieux écartés, à peine
de punition corporelle qui ne pourra être moindre que du fouet
et de la fleur de lys; et, en cas de fréquentes récidives et autres
circonstances aggravantes, pourront être punis de mort, ce que
nous laissons à l'arbitrage des juges. Enjoignons à tous nos sujets
de courir sus aux contrevenants, et de les arrêter et de les conduire
en prison, bien qu'ils ne soient officiers et qu'il n'y ait contre
eux encore aucun décret.
Article 17
Les maîtres qui seront convaincus d'avoir permis
ou toléré telles assemblées composées d'autres esclaves que de
ceux qui leur appartiennent seront condamnés en leurs propres
et privés noms de réparer tout le dommage qui aura été fait à
leurs voisins à l'occasion desdites assemblées et en 10 écus d'amende
pour la première fois et au double en cas de récidive.
Article 18
Défendons aux esclaves de vendre des cannes de
sucre pour quelque cause et occasion que ce soit, même avec la
permission de leurs maîtres, à peine du fouet contre les esclave,
de 10 livres tournois contre le maître qui l'aura permis et de
pareille amende contre l'acheteur.
Article 19
Leur défendons aussi d'exposer en vente au marché
ni de porter dans des maisons particulières pour vendre aucune
sorte de denrées, même des fruits, légumes, bois à brûler, herbes
pour la nourriture des bestiaux et leurs manufactures, sans permission
expresse de leurs maîtres par un billet ou par des marques connues;
à peine de revendication des choses ainsi vendues, sans restitution
de prix, pour les maîtres et de 6 livres tournois d'amende à leur
profit contre les acheteurs.
Article 20
Voulons à cet effet que deux personnes soient
préposées par nos officiers dans chaque marché pour examiner les
denrées et marchandises qui y seront apportées par les esclaves,
ensemble les billets et marques de leurs maîtres dont ils seront
porteurs.
Article 21
Permettons à tous nos sujets habitants des îles
de se saisir de toutes les choses dont ils trouveront les esclaves
chargés, lorsqu'ils n'auront point de billets de leurs maîtres,
ni de marques connues, pour être rendues incessamment à leurs
maîtres, si leur habitation est voisine du lieu où leurs esclaves
auront été surpris en délit: sinon elles seront incessamment envoyées
à l'hôpital pour y être en dépôt jusqu'à ce que les maîtres en
aient été avertis.
Article 22
Seront tenus les maîtres de faire fournir, par
chacune semaine, à leurs esclaves âgés de dix ans et au-dessus,
pour leur nourriture, deux pots et demi, mesure de Paris, de farine
de manioc, ou trois cassaves pesant chacune 2 livres et demie
au moins, ou choses équivalentes, avec 2 livres de boeuf salé,
ou 3 livres de poisson, ou autres choses à proportion: et aux
enfants, depuis qu'ils sont sevrés jusqu'à l'âge de dix ans, la
moitié des vivres ci-dessus.
Article 23
Leur défendons de donner aux esclaves de l'eau-de-vie
de canne ou guildive, pour tenir lieu de subsistance mentionnée
en l'article précédent.
Article 24
Leur défendons pareillement de se décharger de
la nourriture et subsistance de leurs esclaves en leur permettant
de travailler certain jour de la semaine pour leur compte particulier.
Article 25
Seront tenus les maîtres de fournir à chaque
esclave, par chacun an, deux habits de toile ou quatre aunes de
toile, au gré des maîtres.
Article 26
Les esclaves qui ne seront point nourris, vêtus
et entretenus par leurs maîtres, selon que nous l'avons ordonné
par ces présentes, pourront en donner avis à notre procureur général
et mettre leurs mémoires entre ses mains, sur lesquels et même
d'office, si les avis viennent d'ailleurs, les maîtres seront
poursuivis à sa requête et sans frais; ce que nous voulons être
observé pour les crimes et traitements barbares et inhumains des
maîtres envers leurs esclaves.
Article 27
Les esclaves infirmes par vieillesse, maladie
ou autrement, soit que la maladie soit incurable ou non, seront
nourris et entretenus par leurs maîtres, et, en cas qu'ils eussent
abandonnés, lesdits esclaves seront adjugés à l'hôpital, auquel
les maîtres seront condamnés de payer 6 sols par chacun jour,
pour la nourriture et l'entretien de chacun esclave.
Article 28
Déclarons les esclaves ne pouvoir rien avoir
qui ne soit à leurs maîtres; et tout ce qui leur vient par industrie,
ou par la libéralité d'autres personnes, ou autrement, à quelque
titre que ce soit, être acquis en pleine propriété à leurs maîtres,
sans que les enfants des esclaves, leurs pères et mères, leurs
parents et tous autres y puissent rien prétendre par successions,
dispositions entre vifs ou à cause de mort; lesquelles dispositions
nous déclarons nulles, ensemble toutes les promesses et obligations
qu'ils auraient faites, comme étant faites par gens incapables
de disposer et contracter de leur chef.
Article 29
Voulons néanmoins que les maîtres soient tenus
de ce que leurs esclaves auront fait par leur commandement, ensemble
de ce qu'ils auront géré et négocié dans les boutiques, et pour
l'espèce particulière de commerce à laquelle leurs maîtres les
auront préposés, et au cas que leurs maîtres ne leur aient donné
aucun ordre et ne les aient point préposés, ils seront tenus seulement
jusqu'à concurrence de ce qui aura tourné à leur profit, et, si
rien n'a tourné au profit des maîtres, le pécule desdits esclaves
que les maîtres leur auront permis d'avoir en sera tenu, après
que les maîtres en auront déduit par préférence ce qui pourra
leur être dû; sinon que le pécule consistât en tout ou partie
en marchandises, dont les esclaves auraient permission de faire
trafic à part, sur lesquelles leurs maîtres viendront seulement
par contribution au sol la livre avec les autres créanciers.
Article 30
Ne pourront les esclaves être pourvus d'office
ni de commission ayant quelque fonction publique, ni être constitués
agents par autres que leurs maîtres pour gérer et administrer
aucun négoce, ni être arbitres, experts ou témoins, tant en matière
civile que criminelle: et en cas qu'ils soient ouïs en témoignage,
leur déposition ne servira que de mémoire pour aider les juges
à s'éclairer d'ailleurs, sans qu'on en puisse tire aucune présomption,
ni conjoncture, ni adminicule de preuve.
Article 31
Ne pourront aussi les esclaves être parties ni
être (sic) en jugement en matière civile, tant en demandant qu'en
défendant, ni être parties civiles en matière criminelle, sauf
à leurs maîtres d'agir et défendre en matière civile et de poursuivre
en matière criminelle la réparation des outrages et excès qui
auront été contre leurs esclaves.
Article 32
Pourront les esclaves être poursuivis criminellement,
sans qu'il soit besoin de rendre leurs maîtres partie, (sinon)
en cas de complicité: et seront les esclaves accusés, jugés en
première instance par les juges ordinaires et par appel au Conseil
souverain, sur la même instruction et avec les mêmes formalités
que les personnes libres.
Article 33
L'esclave qui aura frappé son maître, sa maîtresse
ou le mari de sa maîtresse, ou leurs enfants avec contusion ou
effusion de sang, ou au visage, sera puni de mort.
Article 34
Et quant aux excès et voies de fait qui seront
commis par les esclaves contre les personnes libres, voulons qu'ils
soient sévèrement punis, même de mort, s'il y échet.
Article 35
Les vols qualifiés, même ceux de chevaux, cavales,
mulets, boeufs ou vaches, qui auront été faits par les esclaves
ou par les affranchis, seront punis de peines afflictives, même
de mort, si le cas le requiert.
Article 36
Les vols de moutons, chèvres, cochons, volailles,
canne à sucre, pois, mil, manioc ou autres légumes, faits par
les esclaves, seront punis selon la qualité du vol, par les juges
qui pourront, s'il y échet, les condamner d'être battus de verges
par l'exécuteur de la haute justice et marqués d'une fleur de
lys.
Article 37
Seront tenus les maîtres, en cas de vol ou d'autre
dommage causé par leurs esclaves, outre la peine corporelle des
esclaves, de réparer le tort en leur nom, s'ils n'aiment mieux
abandonner l'esclave à celui auquel le tort a été fait; ce qu'ils
seront tenus d'opter dans trois jours, à compter de celui de la
condamnation, autrement ils en seront déchus.
Article 38
L'esclave fugitif qui aura été en fuite pendant
un mois, à compter du jour que son maître l'aura dénoncé en justice,
aura les oreilles coupées et sera marqué d'une fleur de lis une
épaule; s'il récidive un autre mois pareillement du jour de la
dénonciation, il aura le jarret coupé, et il sera marqué d'une
fleur de lys sur l'autre épaule; et, la troisième fois, il sera
puni de mort.
Article 39
Les affranchis qui auront donné retraite dans
leurs maisons aux esclaves fugitifs, seront condamnés par corps
envers les maîtres en l'amende de 300 livres de sucre par chacun
jour de rétention, et les autres personnes libres qui leur auront
donné pareille retraite, en 10 livres tournois d'amende par chacun
jour de rétention.
Article 40
L'esclave sera puni de mort sur la dénonciation
de son maître non complice du crime dont il aura été condamné
sera estimé avant l'exécution par deux des principaux habitants
de l'île, qui seront nommés d'office par le juge, et le prix de
l'estimation en sera payé au maître; et, pour à quoi satisfaire,
il sera imposé par l'intendant sur chacune tête de nègre payant
droits la somme portée par l'estimation, laquelle sera régalé
sur chacun desdits nègres et levée par le fermier du domaine royal
pour éviter à frais.
Article 41
Défendons aux juges, à nos procureurs et aux
greffiers de prendre aucune taxe dans les procès criminels contre
les esclaves, à peine de concussion.
Article 42
Pourront seulement les maîtres, lorsqu'ils croiront
que leurs esclaves l'auront mérité les faire enchaîner et les
faire battre de verges ou cordes. Leur défendons de leur donner
la torture, ni de leur faire aucune mutilation de membres, à peine
de confiscation des esclaves et d'être procédé contre les maîtres
extraordinairement.
Article 43
Enjoignons à nos officiers de poursuivre criminellement
les maîtres ou les commandeurs qui auront tué un esclave étant
sous leur puissance ou sous leur direction et de punir le meurtre
selon l'atrocité des circonstances; et, en cas qu'il y ait lieu
à l'absolution, permettons à nos officiers de renvoyer tant les
maîtres que les commandeurs absous, sans qu'ils aient besoin d'obtenir
de nous Lettres de grâce.
Article 44
Déclarons les esclaves être meubles et comme
tels entrer dans la communauté, n'avoir point de suite par hypothèque,
se partager également entre les cohéritiers, sans préciput et
droit d'aînesse, n'être sujets au douaire coutumier, au retrait
féodal et lignager, aux droits féodaux et seigneuriaux, aux formalités
des décrets, ni au retranchement des quatre quints, en cas de
disposition à cause de mort et testamentaire.
Article 45
N'entendons toutefois priver nos sujets de la
faculté de les stipuler propres à leurs personnes et aux leurs
de leur côté et ligne, ainsi qu'il se pratique pour les sommes
de deniers et autres choses mobiliaires.
Article 46
Seront dans les saisies des esclaves observées
les formes prescrites par nos ordonnances et les coutumes pour
les saisies des choses mobiliaires. Voulons que les deniers en
provenant soient distribués par ordre de saisies; ou, en cas de
déconfiture, au sol la livre, après que les dettes privilégié
auront été payées et généralement que la condition des esclaves
soit réglée en toutes affaires comme celle des autres choses mobiliaires,
aux exceptions suivantes.
Article 47
Ne pourront être saisis et vendus séparément
le mari, la femme et leurs enfants impubères, s'ils sont tous
sous la puissance d'un même maître; déclarons nulles les saisies
et ventes séparées qui en seront faites; ce que nous voulons avoir
lieu dans les aliénations volontaires, sous peine, contre ceux
qui feront les aliénations, d'être privés de celui ou de ceux
qu'ils auront gardés, qui seront adjugés aux acquéreurs, sans
qu'ils soient tenus de faire aucun supplément de prix.
Article 48
Ne pourront aussi les esclaves travaillant actuellement
dans les sucreries, indigoteries et habitations, âgés de quatorze
ans et au-dessus jusqu'à soixante ans, être saisis pour dettes,
sinon pour ce qui sera dû du prix de leur achat, ou que la sucrerie,
indigoterie, habitation, dans laquelle ils travaillent soit saisie
réellement; défendons, à peine de nullité, de procéder par saisie
réelle et adjudication par décret sur les sucreries, indigoteries
et habitations, sans y comprendre les nègres de l'âge susdit y
travaillant actuellement.
Article 49
Le fermier judiciaire des sucreries, indigoteries,
ou habitations saisies réellement conjointement avec les esclaves,
sera tenu de payer le prix entier de son bail, sans qu'il puisse
compter parmi les fruits qu'il perçoit les enfants qui seront
nés des esclaves pendant son bail.
Article 50
Voulons, nonobstant toutes conventions contraires,
que nous déclarons nulles, que lesdits enfants appartiennent à
la partie saisie, si les créanciers sont satisfaits d'ailleurs,
ou à l'adjudicataire, s'il intervient un décret; et, à cet effet,
il sera fait mention dans la dernière affiche, avant l'interposition
du décret, desdits enfants nés esclaves depuis la saisie réelle.
Il sera fait mention, dans la même affiche, des esclaves décédés
depuis la saisie réelle dans laquelle ils étaient compris.
Article 51
Voulons, pour éviter aux frais et aux longueurs
des procédures, que la distribution du prix entier de l'adjudication
conjointe des fonds et des esclaves, et de ce qui proviendra du
prix des baux judiciaires, soit faite entre les créanciers selon
l'ordre de leurs privilèges et hypothèques, sans distinguer ce
qui est pour le prix des fonds d'avec ce qui est pour le prix
des esclaves.
Article 52
Et néanmoins les droits féodaux et seigneuriaux
ne seront payés qu'à proportion du prix des fonds.
Article 53
Ne seront reçus les lignagers et seigneurs féodaux
à retirer les fonds décrétés, s'ils ne retirent les esclaves vendus
conjointement avec fonds ni l'adjudicataire à retenir les esclaves
sans les fonds.
Article 54
Enjoignons aux gardiens nobles et bourgeois usufruitiers,
amodiateurs et autres jouissants des fonds auxquels sont attachés
des esclaves qui y travaillent, de gouverner lesdits esclaves
comme bons pères de famille, sans qu'ils soient tenus, après leur
administration finie, de rendre le prix de ceux qui seront décédés
ou diminués par maladie, vieillesse ou autrement, sans leur faute,
et sans qu'ils puissent aussi retenir comme fruits à leur profit
les enfants nés desdits esclaves durant leur administration, lesquels
nous voulons être conservés et rendus à ceux qui en sont maîtres
et les propriétaires.
Article 55
Les maîtres âgés de vingt ans pourront affranchir
leurs esclaves par tous actes vifs ou à cause de mort, sans qu'ils
soient tenus de rendre raison de l'affranchissement, ni qu'ils
aient besoin d'avis de parents, encore qu'ils soient mineurs de
vingt-cinq ans.
Article 56
Les esclaves qui auront été fait légataires universels
par leurs maîtres ou nommés exécuteurs de leurs testaments ou
tuteurs de leurs enfants, seront tenus et réputés, les tenons
et réputons pour affranchis.
Article 57
Déclarons leurs affranchissements faits dans
nos îles, leur tenir lieu de naissance dans nosdites îles et les
esclaves affranchis n'avoir besoin de nos lettres de naturalité
pour jouir des avantages de nos sujets naturels de notre royauté,
terres et pays de notre obéissance, encore qu'ils soient nés dans
les pays étrangers.
Article 58
Commandons aux affranchis de porter un respect
singulier à leurs anciens maîtres, à leurs veuves et à leurs enfants,
en sorte que l'injure qu'ils leur auront faite soit punie plus
grièvement que si elle était faite à une autre personne: les déclarons
toutefois francs et quittes envers eux de toutes autres charges,
services et droits utiles que leurs anciens maîtres voudraient
prétendre tant sur leurs personnes que sur leurs biens et successions
en qualité de patrons.
Article 59
Octroyons aux affranchis les mêmes droits, privilèges
et immunités dont jouissent les personnes nées libres; voulons
que le mérite d'une liberté acquise produise en eux, tant pour
leurs personnes que pour leurs biens, les mêmes effets que le
bonheur de la liberté naturelle cause à nos autres sujets.
Article 60